Depuis sa création, Tesla n’a jamais été un simple constructeur automobile. Avec ses batteries, ses toits solaires et ses solutions de stockage d’énergie (Powerwall, Megapack), l’entreprise d’Elon Musk s’est affirmée comme un acteur technologique complet de la transition énergétique.
Mais une question se pose : Tesla pourrait-elle aller encore plus loin, en intégrant la production d’énergie massive et pilotable grâce au nucléaire ou à l’hydrogène ?
1. Tesla Energy : un modèle déjà tourné vers l’intégration verticale
1.1 Des voitures aux batteries : la stratégie de bout en bout
- Tesla produit ses propres batteries (Gigafactories).
- Elle stocke l’énergie (Megapack).
- Elle distribue et optimise via des logiciels (Tesla Energy Plan, Autobidder).
1.2 La limite actuelle : la dépendance au réseau électrique
Tesla reste tributaire des mix énergétiques locaux. Dans certains pays (France, Norvège), cela signifie une électricité très décarbonée ; dans d’autres (Chine, États-Unis), le charbon et le gaz dominent encore.
➡️ Pour aller au-delà, Tesla pourrait chercher à contrôler sa propre production d’énergie.
2. L’hypothèse nucléaire : un pari sur les petits réacteurs modulaires (SMR)
2.1 Le nucléaire classique : incompatible avec la culture Tesla
Le nucléaire de grande puissance (EPR, réacteurs historiques) demande :
- des délais de construction énormes,
- une réglementation lourde,
- des coûts pharaoniques.
Difficile d’imaginer Tesla s’y engager directement.
2.2 Les SMR : une technologie disruptive qui séduit les industriels
Les Small Modular Reactors (SMR) reprennent les codes chers à Tesla :
- Flexibilité : unités modulaires de 50 à 300 MW.
- Industrialisation : construction en usine plutôt que sur site.
- Innovation : intégration de nouvelles sûretés passives.
Des acteurs comme NuScale (USA), TerraPower (Bill Gates) ou Newcleo (Europe) développent ces technologies.
➡️ Si Tesla rachetait ou investissait dans un acteur de ce segment, elle pourrait :
- alimenter directement ses Gigafactories,
- sécuriser l’approvisionnement de ses batteries,
- proposer de l’électricité décarbonée à ses clients.
2.3 Risques et contradictions
- Elon Musk a toujours mis en avant le solaire et l’éolien comme priorités.
- Le nucléaire reste impopulaire dans certains pays clés.
- Les SMR ne seront pas déployés massivement avant la fin des années 2030.
3. L’hypothèse hydrogène : l’ennemi intime de Tesla
3.1 La position historique d’Elon Musk
Musk n’a jamais mâché ses mots : pour lui, l’hydrogène est une « fool cell », une impasse technologique pour la mobilité.
- Rendement faible comparé aux batteries.
- Infrastructure coûteuse.
- Risques liés au stockage et au transport.
3.2 Pourquoi Tesla pourrait changer de position
Malgré tout, l’hydrogène présente un intérêt certain pour :
- le stockage massif et saisonnier (au-delà des batteries),
- la décarbonation des industries lourdes (acier, ciment),
- le transport maritime et aérien.
Des acteurs comme Plug Power, Nel Hydrogen ou McPhy Energy travaillent sur l’hydrogène vert, produit à partir d’énergies renouvelables.
➡️ Si Tesla voulait couvrir 100 % du spectre énergétique, l’acquisition d’une société spécialisée dans l’électrolyse ou le stockage d’hydrogène ferait sens.
3.3 L’avantage stratégique d’un rachat
- Éviter de laisser Toyota, Hyundai ou Air Liquide dominer ce segment.
- Compléter l’offre Tesla Energy pour les grands comptes industriels.
- Déployer une double stratégie : batteries + hydrogène, adaptée selon les usages.
4. Complémentarité technologique : batteries, nucléaire et hydrogène
4.1 La vision actuelle de Tesla : tout pour la batterie
Tesla domine le marché du stockage stationnaire grâce aux batteries lithium-ion. Mais ce modèle montre ses limites pour :
- stocker de l’énergie sur plusieurs mois,
- alimenter des réseaux entiers,
- sécuriser l’approvisionnement en cas d’intermittence.
4.2 Le rôle du nucléaire
- Fournir une électricité pilotable et décarbonée.
- Servir de base à la production d’hydrogène vert via électrolyse.
- Alimenter directement des Gigafactories Tesla.
4.3 Le rôle de l’hydrogène
- Stockage longue durée pour équilibrer les réseaux.
- Applications où les batteries ne suffisent pas (navires, avions, industries lourdes).
- Complémentarité avec les batteries dans un système énergétique complet.
5. Tesla vers un modèle d’« énergéticien global » ?
5.1 Du constructeur automobile à l’intégrateur énergétique
En rachetant un acteur du nucléaire ou de l’hydrogène, Tesla passerait un cap décisif :
- Ne plus seulement électrifier les usages,
- Mais aussi produire l’énergie nécessaire à cette électrification.
5.2 Un modèle inspiré des géants de l’énergie
Tesla pourrait devenir une sorte de NextEra Energy + Apple :
- production d’électricité décarbonée,
- stockage distribué via batteries,
- consommation intégrée via véhicules et foyers connectés.
5.3 Les limites d’un tel scénario
- Contraintes réglementaires (particulièrement dans le nucléaire).
- Nécessité de lever des capitaux massifs.
- Contradictions avec la communication historique de Musk.
Conclusion : une vision à horizon 2035 ?
À court terme, il est peu probable que Tesla rachète un acteur nucléaire ou hydrogène. Mais à moyen et long terme, l’hypothèse n’est pas absurde :
- Les SMR pourraient séduire Musk pour leur côté modulaire et industriel.
- L’hydrogène vert pourrait devenir un complément incontournable aux batteries.
Si Tesla franchissait ce pas, elle passerait d’un constructeur automobile innovant à un acteur global de l’énergie, capable de maîtriser l’ensemble de la chaîne : production, stockage, distribution et consommation.
👉 Une telle mutation confirmerait ce que beaucoup pressentent déjà : Tesla n’est pas seulement une marque de voitures électriques, mais une entreprise qui veut redéfinir la manière dont l’humanité produit et utilise l’énergie.
