Rénovation énergétique : Un abandon désormais limpide

Chez Tesla Mag, nous avons toujours considéré la rénovation énergétique comme un levier indispensable pour atteindre nos objectifs climatiques, améliorer le confort des ménages et soutenir l’économie locale.
Aujourd’hui, nous choisissons de relayer cette lettre ouverte, rédigée et signée par des acteurs majeurs de la transition énergétique, afin de donner la parole à celles et ceux qui constatent sur le terrain les reculs successifs de la politique publique.

Notre démarche est simple : informer, sensibiliser et amplifier les voix qui œuvrent pour une transition juste et ambitieuse. La rénovation énergétique n’est pas un luxe, c’est un enjeu de dignité sociale, d’efficacité économique et de survie environnementale.

Nous invitons nos lecteurs à prendre connaissance de cette lettre et à réfléchir aux solutions proposées. C’est ensemble, en citoyens engagés et en acteurs responsables, que nous pourrons peser pour que la France retrouve une trajectoire à la hauteur de ses engagements climatiques.

Monsieur le Premier Ministre,

MaPrimeRénov’ réouvre aujourd’hui au parcours accompagné dans une version amoindrie, qui éloignera les ménages des travaux de rénovation énergétique globale et performante.

Nous, acteurs et soutiens de la rénovation énergétique, souhaitons dénoncer ce qui constitue, au fil des années, un abandon par l’État de la politique publique de rénovation énergétique dans son ensemble. Un renoncement aux répercussions à la fois environnementales, sociales, économiques et sanitaires.

Depuis 2017 et le début du premier quinquennat du président de la République Emmanuel Macron, le discours politique sur la rénovation énergétique n’a cessé d’afficher des ambitions élevées, mais les actes, eux, ont tracé une ligne de reculs successifs. Chaque étape aurait dû être celle de la consolidation ; elle s’est révélée être celle du détricotage.

Au fil de ces sept années, des millions de logements sont sortis du statut de passoire thermique, non pas en bénéficiant de travaux de rénovation, mais parce qu’ils ne sont tout simplement plus considérés comme tel du fait des révisions successives des paramètres du DPE. En combinant les révisions de 2020 (introduction de la méthode 3CL-2021), de 2023 (modification des seuils pour les petites surfaces) et de 2025 (révision du coefficient de conversion énergie primaire/énergie finale), ce sont plus de trois millions de logements qui ne sont plus considérés comme des passoires thermiques. Trois millions de logements effacés des statistiques, comme si la réalité matérielle d’une mauvaise isolation et ventilation des murs mal isolés et des factures d’énergie qui flambent pouvait disparaître par décret. C’est une falsification des enjeux, une illusion administrative qui n’a pour effet que de masquer les problématiques rencontrées par des millions de ménages.

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L’histoire aurait pu prendre un autre tournant, en 2024, lorsque la réforme de MaPrimeRénov’ semblait enfin orienter ce dispositif vers les bonnes solutions. Elle avait le mérite de poser enfin les bases d’un mécanisme lisible, plus juste et plus efficace, en instaurant des aides accrues vers des rénovations performantes avec un accompagnement des ménages dans leurs travaux. La rénovation globale, la plus bénéfique en termes d’économies d’énergie et de baisse des émissions de gaz à effet de serre, était favorisée et les ménages les plus modestes voyaient leur reste à charge sur les travaux se rapprocher de zéro.

Mais à peine adoptée, cette réforme a été vidée de sa substance, et n’a cessé de l’être depuis. En 2025, faute de budget suffisant, et en dépit de 80 000 dossiers déposés à la mi-année et de nos alertes, le dispositif a été suspendu pour les rénovations d’ampleur, jusqu’à sa réouverture aujourd’hui, avec de nombreux reculs.

En effet, seuls 13 000 dossiers pourront être déposés avant la fin de l’année. Par ailleurs, le bonus sortie de passoire, permettant aux ménages les plus modestes de limiter leur reste à charge est supprimé. Les montants plafonds de travaux éligibles baissent de 40 %. In fine, l’aide maximale potentielle pour les ménages les plus modestes a été divisée par deux.

Ces choix, présentés comme une réponse à la fraude, laissent les ménages les plus modestes avec un profond sentiment d’abandon par l’État, privés des moyens indispensables pour adapter leur logement. En parallèle, les sécurités techniques ont elles aussi été supprimées. Nous sommes passés d’une incitation financière et d’un encadrement technique à la hauteur des enjeux, à un dispositif dont les financements et les critères techniques nous éloignent des objectifs fixés par la Stratégie nationale bas carbone (SNBC).

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Tout aussi préoccupant, le risque d’augmentation des coûts des travaux est lui toujours présent et les moyens d’anticiper et de lutter contre les fraudes sont toujours absents…

Année après année, et à rebours de toutes les recommandations environnementales et économiques, la rénovation énergétique voit aujourd’hui son financement fondre et son cadre réglementaire sans cesse menacé. Alors que chaque euro investi dans la rénovation rapporte en emplois, en économies d’énergie, en confort et gains en santé publique, notamment au travers d’une qualité de l’air intérieur adéquate, l’ambition diminue. Le Gouvernement envoie ainsi un message regrettable : il renonce à son propre cap, sa crédibilité et ses engagements climatiques.

Un renoncement aux dimensions multiples

  • Environnemental : recul face au dérèglement climatique.
  • Social : les passoires thermiques touchent avant tout les ménages modestes, contraints chaque hiver de choisir entre chauffer leur logement et payer d’autres dépenses essentielles.
  • Économique : la rénovation énergétique représente des centaines de milliers d’emplois non délocalisables (artisans, PME, filières industrielles). En désarmant la politique publique, on prive la France d’un levier de croissance et de stabilisation de l’emploi.
  • Sanitaire : vagues de chaleur de plus en plus intenses, près de 20 000 décès prématurés chaque année liés à une mauvaise qualité de l’air intérieur. Le logement devient une question de santé publique.

Laisser passer le temps, affaiblir les dispositifs, renoncer aux moyens, c’est un choix politique clair : celui du renoncement face à un dérèglement climatique pourtant galopant.

Nos propositions pour une trajectoire ambitieuse

Il est encore temps de renverser la trajectoire. Non plus en multipliant les annonces creuses, mais en assumant une stratégie claire inscrite dans la durée :

  • Pérenniser et amplifier MaPrimeRénov’ pour des rénovations performantes, dans sa version issue du Projet de loi de Finances pour 2024.
  • Mobiliser l’ensemble des financements disponibles pour garantir un plan pluriannuel de rénovation énergétique à la hauteur des objectifs nationaux et européens.
  • Faire de la prise en compte des bouilloires thermiques un pilier central de la politique du logement et de l’aménagement urbain, en mettant à l’ordre du jour la proposition de loi transpartisane visant à adapter les logements aux fortes chaleurs et à protéger leurs occupants.
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La rénovation n’est pas un luxe. C’est une condition de dignité sociale, un moteur économique, et une digue face aux chocs climatiques. Tout recul en la matière constitue une faute qui se paie au fil des décennies.


Signataires

  • Jean-Louis Bal, président d’Agir pour le Climat
  • Nathalie Bonnevide, Présidente de l’ACAD
  • Philippe Boussemart, Président du Groupement du Mur Manteau
  • Christian Cardonnel, dirigeant de CCConsultants
  • Jean-Charles Colas-Roy, Président de Coénove
  • Maryse Combrès, Présidente FLAME – Fédération des ALEC
  • Didier Duriez, Président du Secours Catholique Caritas France
  • Antoine Gatet, Président de France Nature Environnement
  • Nicolas Garnier, délégué Général d’Amorce
  • Hélène Gassin, Présidente de l’Association négaWatt
  • Marie Gracia, Directrice du collectif Effinergie
  • Vincent Legrand, Gérant de l’Institut négaWatt et Président de Dorémi
  • Philippe Méjean, Président de Cléo-Rénov’
  • Delphine Mugnier, présidente du réseau Cler
  • Nicolas Nace, chargé de campagne transition énergétique à Greenpeace France
  • Maider Olivier, chargée de plaidoyer climat – Fondation pour le Logement des Défavorisés

Organisations signataires

  • Collectif Isolons la Terre contre le CO2
  • Oxfam
  • UFC-Que Choisir

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